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Coin lecture B


Voici quelques textes …bizarres.
Certains sont fantastiques , d’autres étranges, d’autres appartiennent à la  science-fiction.
Il ne faut pas les croire... juste les lire et se laisser porter par leur étrangeté. 
Il n'y a pas de devoir dans cette partie mais vous pouvez laisser un commentaire en bas de cette page si vous voulez, avez-vous aimé ? Lequel préférez-vous ? Vous pouvez aussi discuter entre vous de ces textes dans le forum ou encore dans le chat. Bonne lecture !
Pour rappel voici le lien pour visiter le forum :
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BARBIE (inédit)
Bernard Friot

  Zoé sort ses poupées Barbie. Une, deux, trois, quatre…, elle en a douze en tout. Elle prend une paire de ciseaux, aussi. Et coupe la tête d’une Barbie. C’est difficile, avec des ciseaux, alors elle prend un couteau, un long couteau de cuisine. C’est bien mieux, zic zac, les têtes tombent : une, deux, trois, quatre…, elle coupe toutes les têtes.
Alors elle prend du fil et une aiguille. Elle perce les têtes, passe le fil, voilà, ça fait un collier. Un collier de têtes. Têtes de poupées, poupées Barbie.
Elle met le collier autour de son cou. Elle se regarde dans la glace. Et elle sourit.
- Comme je suis belle, pense-t-elle.

AUTOSTOP
J. F Laguionie

     Ils l'avaient trouvé sur le bord de la route, un jour de pluie. Il était sale. Il sentait mauvais...Néanmoins, mon oncle le fît monter dans la voiture, après avoir pris la précaution de mettre un plastique pour protéger la couverture-housse du siège arrière.
C'était le temps des départs en vacances... On trouvait de tout sur les routes.
- Je suis sûre qu'on l'a abandonné intentionnellement !
Le cœur de ma tante fondait comme neige au soleil sur le chemin de la maison. Pourtant le nouveau venu ne semblait pas désespéré... Non, il regardait au dehors sans rien dire, le nez collé à la vitre.
Ils l'appelèrent Hector.
Cela lui allait très bien, selon ma tante. A cause de ses grands yeux tristes, ajouta-t-elle d'un air entendu. Où avait-elle lu de la tristesse dans ses yeux ?
On lui aménagea un coin sous l'escalier, avec un gros coussin et une cuvette pour faire ses besoins. Fine cuisinière, ma tante comprit très vite les goûts de son protégé. Elle se mit à lui mijoter des petits plats qu'il dégustait en cachette dans la cuisine, lorsque mon oncle était au travail.
En revanche, il observa nos habitudes, et de sa propre initiative, entreprit de nous aider... Les fleurs, par exemple. De lui-même, il apprit à les arroser... Il fallait le voir, l'air important, coiffé du vieux chapeau de paille de mon oncle, se faufiler entre les tulipes géantes !
Ma tante, a toujours prétendu qu'il était parfaitement heureux. Je n'en suis pas si sûr. Soit, il était aimable, allait chercher le journal, les provisions de la semaine, et annonçait les visiteurs d'une humeur toujours égale... Mais je l'ai surpris plus d'une fois près de la fenêtre donnant sur la cour, en train de rêver !
Un jour, Hector revint, après les courses accompagné d'un homme.
- Veuillez m'excuser... Je vois que vous l'avez recueilli...
Il était mou et froid et avait un regard cruel, dit ma tante lorsqu'il fut parti. Pendant tout l'entretien avec l'inspecteur, Hector garda le silence. D'une voix distraite, il répondit cependant à certaines questions. Il comprenait certainement ce qui se passait, j'en jurerais, et ses yeux allaient de l'un à l'autre.
L'inspecteur a bredouillé de vagues paroles sur les dangers auxquels on s'exposait en ramassant un inconnu sur la route... Carte de séjour périmée, etc. Ma tante, je m'en souviens, voulait l'interrompre, mais mon oncle, terrorisé, lui faisait de grands signes... Bref, l'homme a accepté un peu d'argent et il est parti sans difficultés.
Qui nous avait dénoncés ? Nous avons tout de suite pensé à Madame Groll, cotre voisine, qui a son fils au Ministère.
Enfin, tout se terminait bien... Et Hector faisait partie de la maison, maintenant.
Et puis, il a fallu ces inscriptions sur les murs du vécé ! Des dessins et des phrases obscènes. Craignant la colère de mon oncle, ma tante me força à repeindre les murs avant le soir. Le lendemain, les dessins apparurent sur les murs du couloir !  Nous nous attendions à un drame. Mais mon oncle ne s'émut nullement, à notre stupéfaction. Il sourit même en regardant les graffiti.
Peut-être a-t-il parfois besoin d'une compagne, dit-il.
- Hector ? s'écria ma tante, penses-tu ! Il est si jeune ! Quel âge peut-il avoir ? trente-huit-trente-neuf ans ! C'est difficile à dire.
En tous les cas. Je sais qu'il ne restera plus longtemps chez nous.

J. F Laguionie. Les puces de Sable. 1980


CE QU'ON S’AMUSAIT !
Isaac Asimov

Ce soir-là, Margie nota l'événement dans son journal. A la page qui portait la date du 17 mai 2155, elle écrivit « Aujourd’hui, Tommy a trouvé un vrai livre !»
C'était un très vieux livre. Le grand-père de Margie avait dit un jour que, lorsqu'il était enfant, son propre grand-père lui parlait du temps où les histoires étaient imprimées sur du papier.
On tournait les pages, qui étaient jaunes et craquantes, et il était joliment drôle de lire des mots qui restaient immobiles au lieu de se déplacer comme ils le font maintenant — sur un écran, comme il est normal. Et puis, quand on revenait à la page précédente, on y retrouvait les mêmes mots que lorsqu'on l'avait lue pour la première fois.
- Sapristi, dit Tommy, quel gaspillage ! Quand on a fini le livre, on le jette et puis c'est tout, je suppose. II a dû passer des millions de livres sur notre poste de télévision, et il en passera encore bien plus. Et je ne voudrais pas le jeter, le poste.
- C'est pareil pour moi, dit Margie. Elle avait onze ans et n'avait pas vu autant de télé livres que Tommy, qui était de deux ans son aîné.
- Où l'as-tu trouvé ? demanda-t-elle.
- Chez nous. Il lit un geste de la main sans lever les yeux, accaparé qu'il était par sa lecture. «Dans le grenier.
- De quoi parle-t-il ?
- De l'école. »
Margie fit une moue de dédain.
- L’école ? Qu'est-ce qu'on peut écrire sur l’école ? Je n'aime pas l'école.
Margie avait toujours détesté l'école, mais maintenant elle la détestait plus que jamais. Le maître mécanique lui avait fait subir test sur test en géographie et elle s'en était tirée de plus en plus mal. Finalement sa mère avait secoué tristement la tête et fait venir l'inspecteur régional.
L'inspecteur, un petit homme rond à la figure rougeaude, était venu avec une boîte pleine d'ustensiles, d'appareils de mesure et de fils métalliques. Il avait fait un sourire à l'enfant et lui avait donné une pomme. Puis il avait mis le maître en pièces détachées. Margie avait espéré qu'il ne saurait pas le remonter, mais son espoir avait été déçu. Au bout d'une heure environ, le maître était là de nouveau, gros, noir, vilain, avec un grand écran sur lequel les leçons apparaissaient et les questions étaient posées. Et ce n'était pas cela le pire. Ce qu'elle maudissait le plus, c'était la fente par où elle devait introduire ses devoirs du soir et ses compositions. Elle devait les écrire en un code perforé qu'on lui avait fait apprendre quand elle avait six ans et le maître mécanique calculait les points en moins de rien.
Son travail terminé, l'inspecteur avait souri et avait caressé la tête de Margie. Puis il avait dit à sa mère : « Ce sont des choses qui arrivent. Je l'ai ralenti pour qu'il corresponde au niveau moyen d'un enfant de dix ans. En fait, le diagramme général du travail de votre fille est tout à fait satisfaisant. » Et il avait tapoté de nouveau la tête de Margie.
Margie était déçue. Elle avait espéré qu'il emporterait le maître avec lui. Une fois, on était venu chercher le maître de Tommy et on l'avait gardé près d'un mois parce que le secteur d'histoire avait flanché complètement.
Elle demanda encore à Tommy :
- Pourquoi quelqu'un écrirait-il quelque chose sur l’école ?
Tommy la gratifia d'un regard supérieur.
- Ce que tu es stupide, il ne s'agit pas du même genre d'école que maintenant. Ça, c'est l'école qui existait il y a des centaines et des centaines d'années. » II ajouta avec hauteur, détachant les mots avec soin : « Il y a des siècles. »
Margie était vexée.
- Eh bien, je ne sais pas quelles écoles ils avaient il y a si longtemps. » Elle lut quelques lignes du livre par-dessus son épaule, puis ajouta : « En tout cas, ils avaient un maître.
Bien sûr qu'ils avaient un maître, mais ce n'était pas un maître normal. C'était un homme.
- Un homme ? Comment un homme pouvait-il faire la classe ?
- Eh bien, il apprenait simplement des choses aux garçons et aux filles et il leur donnait des devoirs à faire à la maison et leur posait des questions.
- Un homme n'est pas assez intelligent pour ça ?
- Sûrement que si. Mon père en sait autant que mon maître.
- Pas vrai. Un homme ne peut pas en savoir autant qu'un maître.
- II en sait presque autant, ça je t'en fais le pari. » Margie n'était pas disposée à discuter. Elle dit :
- Je ne voudrais pas d'un homme dans ma maison pour me faire la classe.
Tommy se mit à rire aux éclats.
- Ce que tu peux être bête, Margie. Les maîtres ne vivaient pas dans la maison. Ils avaient un bâtiment spécial et tous les enfants y allaient.
- Et tous les enfants apprenaient la même chose ?
- Bien sûr, s'ils avaient le même âge.
- Mais maman dit qu'un maître doit être réglé d'après le cerveau de chaque garçon et de chaque fille et qu'il ne doit pas leur apprendre la même chose à tous.
- Ça n'empêche pas qu'on ne faisait pas comme ça à cette époque-là. Et puis si ça ne te plaît pas, je ne te force pas à lire ce livre.
-Je n'ai jamais dit que ça ne me plaisait pas, répliqua vivement Margie.
Elle voulait s'informer sur ces étranges écoles.
Ils en étaient à peine à la moitié du livre quand la mère de Margie appela :
- Margie ! L'école !
Margie leva la tête.
- Pas encore, maman !
- Si.  C'est l'heure, dit Mrs. Jones. Et c'est probablement l'heure pour Tommy aussi.
- Est-ce que je pourrai encore lire un peu le livre avec toi après l’école ? demanda Margie à Tommy.
- Peut-être, dit-il nonchalamment. Il s'éloigna en sifflotant, le vieux livre poussiéreux serré sous son bras.
Margie entra dans la salle de classe. Celle-ci était voisine de sa chambre à coucher et le maître mécanique avait été mis en marche et l'attendait. On le branchait toujours à la même heure chaque jour sauf le samedi et le dimanche, car la mère de Margie disait que les filles de cet âge apprenaient mieux si les leçons avaient lieu à des heures régulières.
L'écran était allumé et proclamait : « La leçon d'arithmétique d'aujourd'hui concerne l'addition des fractions. Veuillez insérer votre devoir d'hier dans la fente appropriée. »
Margie s'exécuta avec un soupir. Elle pensait aux anciennes écoles qu'il y avait, du temps que le grand-père de son grand-père était encore enfant. Tous les enfants du voisinage arrivaient alors en riant et en criant dans la cour de l'école, s'asseyaient ensemble dans la classe et partaient ensemble pour rentrer chez eux à la fin de la journée. Et comme ils apprenaient les mêmes choses, ils pouvaient, s’aider pour faire leurs devoirs du soir et en parler entre eux.
Et les maîtres étaient des gens...
Sur l'écran du maître mécanique, on lisait maintenant en lettres lumineuses : « Quand nous additionnons les fractions 1/2 et 1/4... »
Et Margie réfléchissait : comme les enfants devaient aimer l'école au bon vieux temps ! Comme ils devaient la trouver drôle... Oui, en ce temps-là. Ce qu'on s’amusait !


CAUCHEMAR EN GRIS
Fréderic BROWN

Il se réveilla, choyé par une merveilleuse sensation de bien-être, caressé par l'éclat et la douce chaleur du soleil dans l'air printanier. Il s'était assoupi sans bouger sur le banc du jardin public, seule sa tête s'était penchée en avant ; son somme n'avait pas duré plus d'une demi-heure, il le savait, puisque l'ombre du doux soleil n'avait que peu avancé pendant son sommeil.
Le jardin resplendissait tout de vert vêtu, un vert plus doux que celui de l'été ; voilà une journée magnifique où il faisait bon être amoureux. Merveilleusement amoureux, amoureux et jeune à en avoir le vertige. Et heureux en amour, car la veille, ce samedi, il s'était déclaré à Susan dans la soirée et elle avait dit oui. Plus ou moins oui. Pour être précis, elle ne lui avait pas dit oui, mais elle l'avait invité à venir, aujourd'hui dimanche, dans l'après-midi, faire la connaissance de ses parents ; elle avait dit : "J'espère que vous les aimerez et qu'ils vous aimeront… qu'ils vous aimeront autant que je vous aime." Si ce n'était pas là l'équivalent d'un oui, qu'était-ce ?
Leur amour était né plus ou moins sur un coup de foudre, raison pour laquelle il ne connaissait pas encore les parents de la jeune fille. Adorable Susan aux doux cheveux sombres, à l'adorable petit nez, presque retroussé, aux tendres taches de rousseur et aux grands yeux noirs si doux… C'était la chose la plus merveilleuse qui lui fût jamais arrivée, la chose la plus merveilleuse qui pût arriver à n'importe qui.
On en était à ce "milieu d'après-midi" où Susan lui avait dit de venir. Il se leva de son banc et, un peu engourdi par sa sieste, il s'étira voluptueusement. Puis il se mit en route vers la maison où il avait raccompagné Susan la veille au soir, sise à quelques centaines de mètre du jardin public où il s'était assis pour tuer le temps. Ce fut une petite promenade agréable sous le beau soleil, par ce beau jour de printemps. Il monta les marches du perron, frappa à la porte. La porte s'ouvrit et, pendant une fraction de seconde il crut que c'était Susan qui lui ouvrait. Mais la jeune fille ressemblait seulement à Susan. Sa sœur, sans doute – la veille elle lui avait parlé d'une sœur, son aînée d'un an. Il s'inclina et se présenta cérémonieusement, puis demanda à voir Susan. Il eut l'impression que la jeune fille le regardait d'un œil bizarre, mais elle se contenta de lui dire : "Entrez, je vous prie, elle n'est pas là pour l'instant, mais si vous voulez bien attendre au salon, là…" Il s'assit et attendit au salon. C'était bizarre que Susan fut sortie. Même pour peu de temps. C'est alors qu'il entendit la voix, la voix de la jeune fille qui lui avait ouvert la porte ; la jeune fille parlait dans l'entrée et, poussé par une explicable curiosité, il se leva et alla coller son oreille contre la porte. La jeune fille parlait, semble-t-il, au téléphone. "Harry ? Je t'en supplie, rentre immédiatement ! Et ramène le docteur ! Oui, c'est grand-père… Non, pas une nouvelle attaque cardiaque… Non, c'est comme la dernière fois où il a eu sa crise d'amnésie et où il a cru que grand-mère était encore… Non, ce n'est pas de la démence sénile, Harry, simplement de l'amnésie. Mais cette fois, c'est plus grave. Il a décroché de cinquante ans… il est revenu à l'époque où il n'avait pas encore épousé grand-mère…" Soudain très vieux, vieille de cinquante ans en cinquante secondes, grand-père se mit à sangloter sans bruit, appuyé contre la porte.

F. BROWN, Fantômes et farfafouilles, éd. Denoël, 1963.

A suivre...

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